Quand la première économie mondiale vit à crédit
Pour Brad Smith, Président de Microsoft, « l’IA (Intelligence Artificielle) est l’électricité de notre époque et les 4 prochaines années peuvent jeter les bases du succès économique de l’Amérique pour le prochain quart de siècle : une innovation en or pour le leadership américain ».
Selon la société d’analyse Spherical Insights, la taille du marché de l’IA aux Etats-Unis devrait atteindre environ 730 milliards d’ici 2032 à comparer à une taille du marché en 2022 de 37,5 milliards. Son taux de croissance annuel composé sur 2022-2032 serait de 34,6%.
On comprend, dès lors, l’enjeu que représente l’IA pour les perspectives économiques des Etats-Unis : force est de constater qu’ils ont les atouts et les moyens…
Les Etats-Unis, leadership dans l’innovation IA
La suprématie des Etats-Unis dans l’innovation est fondée sur 3 piliers :
- L’Excellence académique : les institutions prestigieuses telles que le MIT, Stanford ou Caltech (California Institute of Technology) continuent d’attirer les talents et de former l’élite mondiale. La proximité de ces entités avec les mastodontes du secteur technologique est un accélérateur indéniable pour passer de l’innovation à la commercialisation : un employé de Google sur 20 est issu de Stanford. Même si la Chine dépose désormais davantage de brevets, les Etats-Unis dominent toujours dans la production d’Intelligence Artificielle de haut niveau et restent l’incubateur des idées les plus pertinentes et performantes.
- La Silicon Valley reste à ce jour le cœur de l’innovation et sa rampe de lancement internationale avec plus de 3000 start-up innovantes et actives. La force de cet écosystème est d’exceller dans l’art de se réinventer : il y règne la culture du capital-risque dont la Sand Hill Road est l’épicentre, et de l’expérimentation. Aussi, des homologues émergents tels que Miami ou Austin qui, s’inspirant de leur ainée, deviennent désormais les acteurs d’une innovation américaine de plus en plus décentralisée, dynamique et stimulante.
- Des financements publics et privés : en 2025, les Etats-Unis conservent une avance nette en la matière. Le AI Index Rapport 2025 publié par Stanford révèle ainsi que 49 start-up américaines ont levé 109 milliards de dollars, soit presque 12 fois plus que la Chine (9,3 milliards de dollars), 24 fois plus que le Royaume-Uni (4,5 milliards de dollars) et 42 fois plus que la France (2,6 milliards de dollars). Une tendance forte concerne l’IA générative avec 33,9 milliards d’investissements privés à l’échelle mondiale soit une progression de 18,7% par rapport à 2023. Et 2025 s’annonce encore plus spectaculaire ! Dès ce premier trimestre, les levées de fonds montrent que l’IA est une priorité pour les investisseurs convaincus de son effet de levier. Le mois de mars a ainsi marqué un record avec, par exemple, OpenAI qui a rassemblé 40 milliards en IA générative pour une valorisation à 300 milliards de dollars.
Des investissements massifs pour assurer la souveraineté technologique américaine : la rapidité de la transformation industrielle
Le lien entre le gouvernement et les acteurs majeurs de l’IA s’avère de plus en plus étroit.
Ce lien, initié par Obama, connait un véritable tournant dans cette 2ème mandature de Trump. OpenAI, Google, Palantir ainsi que les associations SIA (Semi Conductor Industry) le soutiennent pleinement, en recommandant notamment, lors d’une consultation du 25 février, le développement de la commande publique et l’adoption de l’IA par le gouvernement et l’accès des start-up aux programmes d’agences fédérales.
La course aux investissements en infrastructures (DataCenters et GPU – Graphics Processing Unit) ne cesse de s’intensifier. Les hyperscalers (fournisseurs de services de cloud computing à grande échelle) en particulier Microsoft, Alphabet, Amazon et Meta, après y avoir consacré 151 milliards en 2023, 246 milliards en 2024, franchiront la barre des 300 milliards en 2025 et devraient atteindre les 371 milliards en 2026. Pour autant, la demande de puissance de calcul demeure toujours supérieure à l’offre qui reste en sous-capacité comme les dernières publications l’ont révélé.
En outre, les hyperscalers ont des clusters de plus en plus importants : en 2 ans, un DataCenter est passé de 16 000 à plus de 100 000 GPU, ce qui entrainent des investissements considérables en dernières générations de puces et équipements réseaux.
GAFAM : CAPEX réalisés + annoncés (Mds $) et croissance (%Y/Y)

Source : Bloomberg, commentaires management. Microsoft publie en année fiscale décalée (fin juin)
Ces investissements se concrétisent dans les grands projets annoncés récemment ::
- Le projet Stargate annoncé par Trump le lendemain de son investiture et qui devrait se concrétiser par un investissement allant jusqu’à 500 milliards de dollars d’ici 2029 par l’alliance entre les 3 acteurs majeurs, OpenAI (ChatGPT), le géant du numérique Oracle et le fonds d’investissement japonais spécialisé dans les nouvelles technologies Softbank. Ce projet semble cependant souffrir, pour l’instant, de la politique des droits de douane et peine à trouver des financements.
- Parallèlement, le 24 juin dernier, Masayoshi Son, le CEO de Softbank a annoncé vouloir créer un complexe industriel IA à 1000 milliards de dollars en Arizona, dédié à l’IA et à la robotique.
- Face aux menaces de droits de douane, les entreprises technologiques s’avèrent de plus en plus enclines à rapatrier leur production aux Etats-Unis : à l’instar d’Apple qui, en février dernier s’est engagé à investir 500 milliards de dollars sur les 4 prochaines années, Nvidia a annoncé le 14 avril son intention de construire des serveurs d’IA pour 500 milliards de dollars sur 4 ans aux Etats-Unis en partenariat notamment avec TSMC.
- Le 13 juin dernier, le fabricant de semi-conducteurs américain Micron a annoncé augmenter ses investissements de 30 milliards face à la demande liée à l’IA sur une enveloppe totale de 200 milliards de dollars afin de répondre à la demande du marché et maintenir son objectif de produire 40% de ses DRAM aux Etats-Unis..
On le voit, l’avance et la force des Etats-Unis en matière d’IA reposent sur une chaîne de valeurs complète : des puces à l’architecture logicielle, grâce aux puissances de supercalculs des Datacenters jusqu’aux applications. Comme le relevait Brad Smith « la performance des acteurs américains repose sur un écosystème d’interdépendances ».
Dans cette course au développement, l’Intelligence Artificielle devient incontestablement un enjeu dans la guerre économique que se livrent les Etats-Unis et la Chine.
Achevé de rédiger le 04/07/2025 par Béryl Courcoux, gérante de portefeuilles.
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