La Bourse chahutée

Depuis l’investiture de Donald Trump à la Maison Blanche, les marchés financiers font face à une montée des tensions liée à sa politique commerciale agressive. Ce climat s’est nettement durci avec le « Liberation Day » du 2 avril, lorsque l’administration américaine a dévoilé une série de taxes douanières à des niveaux historiques et d’une sévérité inattendue.

Comment ont réagi les marchés ces derniers mois ?

Nous notions l’an dernier la forte disparité de performance, au sein d’un même indice boursier, parmi les différentes valeurs le composant.

Ainsi, les indices américains ont connu de très belles performances en 2024 : le Nasdaq composite a progressé sur l’année de 29,6%, tandis que le S&P 500 affichait une performance de 25%. Ces chiffres ne sont cependant qu’une moyenne et ne donnent qu’une vue parcellaire du parcours des émetteurs. En effet, corrigée des 7 magnifiques que sont Apple, Amazon, Alphabet, Microsoft, Meta, Nvidia et Tesla, la performance n’est plus que de 11% pour le Nasdaq par exemple.

Le même phénomène se poursuit aujourd’hui, dans un contexte de forte volatilité des marchés depuis l’élection de Donald Trump. Ainsi, aux Etats-Unis et avant même les derniers mouvements boursiers suite au « Liberation Day » du 2 avril, les secteurs montraient des performances contrastées ; dans son ensemble, l’indice S&P 500 affichait au 31/03/2025 une contre-performance de -6% depuis le 1er janvier 2025, tandis que les secteurs de l’or, de la santé et du tabac enregistraient des hausses de plus de 20%.

En Europe, entre le début de l’année et le 31 mars dernier, le Stoxx Europe 600 affichait pour sa part une hausse de plus de 7%. Celle-ci est principalement portée par quelques secteurs, et en particulier les secteurs bancaire et assurance, qui enregistraient respectivement des hausses de 21% et 16%, tandis que les secteurs des loisirs, du commerce de détail et de l’immobilier étaient pour leur part négatifs sur la même période.

Cette disparité peut s’expliquer par plusieurs facteurs comme :

  • Le cycle économique : caractère défensif ou cyclique de l’activité ;
  • L’évolution de la politique monétaire, les secteurs endettés étant affectés notamment par les périodes de remontée des taux d’intérêt, de même que le secteur bancaire en cas de pentification de la courbe des taux d’intérêt ;
  • Le prix des matières premières ;
  • L’innovation et/ou la disruption technologique ;
  • L’évolution de la réglementation et ou de la politique ;
  • La valorisation…

Il est important de noter que, malgré la surperformance des secteurs défensifs tels que la consommation de base et la santé, l'indice S&P 500 dans son ensemble a connu une correction, depuis son sommet du 19 février 2025.

Or la Maison Blanche fait désormais peser un niveau d’incertitude sur l’économie américaine et, par ricochet, sur l’économie mondiale, tant par l’ampleur des mesures envisagées que par le côté souvent erratique des annonces

Cette confusion dans le discours paralyse l’économie américaine, conduisant ainsi le directeur de la Fed, Jerome Powell, à indiquer que l’incertitude économique atteint désormais des niveaux « remarquablement élevés ». Cette incertitude se traduit par exemple dans la révision faite par l’entreprise de logistique Fedex, qui corrigeait ses prévisions annuelles à la baisse le 20 mars dernier faute de visibilité économique et industrielle. De la même manière, le fournisseur de données financières Factset relevait que plus de la moitié des sociétés de l’indice S&P 500 citaient, au cours du premier trimestre de cette année, la question des tarifs douaniers dans leurs relations investisseurs, proportion qui n’avait jamais été atteinte au cours des dix dernières années.

Or on le sait, la Bourse n’aime pas l’incertitude. Depuis l’investiture de Donald Trump, c’est donc pratiquement dans leur ensemble que les indices américains fléchissent, presqu’indépendamment de la solidité du modèle d’affaires sous-jacent. Le caractère clivant de la politique économique de Donald Trump avait en effet conduit à une division au sein de l’indice S&P 500, entre les entreprises bénéficiaires de sa politique, et celles qui en seraient affectées négativement. Dans une analyse parue en mars dernier, le journal The Economist a ainsi divisé le S&P 500 entre d’une part, les 43% des entreprises dont la performance dépassait celle de l’indice dans les jours suivant l’élection et, d’autre part, les 57% dont la performance était moindre sur cette même période. Or si les gagnants du programme Trump ont gardé cette position de supériorité dans les quelques semaines suivant l’élection, les performances des deux groupes, depuis mi-février, sont aujourd’hui comparables.

Les mesures de la Maison Blanche affectent ainsi bien évidemment les prévisions de croissance nationale et internationale

Elles atteignent celles des entreprises qui comprennent des éléments d’extra-territorialité, dans leurs composants, leurs débouchés, leur main d’œuvre. Et ce remaniement se ressent sur l’évolution des indices, dont le niveau peine à être soutenu par des champions nationaux.

Les marchés boursiers sont coutumiers de phénomènes de retournement, tels que celui que nous connaissons actuellement. Les valeurs européennes enregistraient ainsi depuis le début de l’année 2025 un phénomène inverse à celui constaté sur le marché américain, l’Eurostoxx 50 progressant de 7% à fin mars, tandis que le CAC 40 prenait 7% sur la même période. Pour autant, gardons-nous d’en tirer des conclusions trop hâtives, particulièrement dans une période aussi bousculée. En 2024, ces mêmes indices affichaient en effet des retards de près de 20% par rapport à leur homologue américain. Surtout, certains éléments de fond viennent nuancer l’analyse immédiate induite par ces mouvements boursiers puisque, indépendamment des annonces de la Maison Blanche, certains éléments continuent à montrer une meilleure tenue de l’économie américaine, tels que par exemple un niveau de croissance économique et des bénéfices par action qui restent supérieurs aux Etats-Unis par rapport à l’Europe, ou encore le coût de l’énergie qui reste 4 fois plus élevé en Europe.

La période actuelle voit s’ébranler nombre de fondamentaux en termes d’équilibres géopolitiques, de rupture technologique ou de phénomènes climatiques, conduisant nécessairement à des chahuts boursiers. Dans ces périodes, les exemples tirés des crises boursières précédentes montrent que les facteurs permettant aux valeurs de rebondir sont leur qualité et leur faculté à innover.

Achevé de rédiger le 17/04/2025 par Charlotte Tasso, Directrice Générale et Nadja de Benedit, Responsable de la gestion collective.

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